La succession est souvent sujette à divers conflits. Quels sont les droits de chaque membre de la famille ? Qu’en est-il de ceux mariés sous différents régimes matrimoniaux et quid des procédures à l’ouverture d’une succession ? Toutes ces questions ont été abordées lors de l’émission thématique Explik ou Ka. Me Varuna Punchoo, notaire, était l’invitée de Priscilla Sadien.
Me Varuna Punchoo explique qu’il y a souvent des confusions en ce qui concerne les régimes matrimoniaux. « Les gens pensent que leurs droits dans la succession de leur conjoint sont différents selon le régime matrimonial qu’ils ont choisi. Ce n’est pas du tout le cas. Le régime matrimonial n’affecte que ce qui se passe à partir de la date du mariage jusqu’à ce qu’il prenne fin, soit au moment du divorce ou d’un décès. Après le décès, peu importe le régime, les lois sont les mêmes ».
Elle précise que ce qui est différent concerne principalement les biens et les dettes. « Sous le régime de la communauté de biens, tout ce que l’un des conjoints achète devient un bien commun du couple, même si c’est une seule personne qui a fait ou financé cet achat. Cependant, il est important de mentionner qu’il en va de même pour les dettes. Peu importe qui a contracté la dette, dans la majorité des cas (sauf exception), la dette est commune, par exemple, l’achat d’un réfrigérateur ou un prêt pour les études des enfants ».
Elle ajoute que la question de régime matrimonial est souvent un sujet tabou. « Il y a souvent la perception que si nous nous marions sous le régime de séparation de biens, cela signifie que notre conjoint ne nous aime pas, qu’il est égoïste ou qu’il veut garder tous les biens. Au contraire, c’est plus prudent pour les couples et je conseille toujours les gens de se marier sous le régime de séparation de biens ».
Le notaire précise que sous le régime de séparation de biens, les époux peuvent aussi faire des projets ensemble, notamment acheter un bien ou contracter un prêt ensemble. « Ils peuvent par la suite décider de le faire chacun de leur côté sans que cela n’engage des responsabilités de la part de l’autre conjoint ».
En ce qui concerne l’héritage, elle précise que si un conjoint reçoit un bien en héritage de ses parents, l’époux ou la femme de ce dernier n’a aucun droit sur ces biens peu importe le régime matrimonial. « C’est un bien propre et c’est uniquement l’héritier qui peut en disposer ».
La loi prévoit la possibilité de changer de régime matrimonial. Pour ce faire, il faut que cinq années de mariage se soient écoulées. Les deux époux doivent donner leur consentement pour le changement de régime devant un notaire. Par la suite, c’est le juge qui déterminera si c’est dans l’intérêt de la famille ou pas de changer de régime matrimonial.
De son vivant toute personne a le droit de faire une donation à la personne de son choix. Une personne peut aussi planifier la transmission de ses biens de son vivant, qui prendra effet à son décès à travers un testament. « C’est toujours conseillé de planifier le partage des biens pour éviter des bagarres familiales ».
La réalité est telle qu’un mariage sur trois se termine en ce moment par un divorce, explique le notaire. C’est surtout pour cette raison qu’elle conseille aux couples le régime de séparation de biens.
« Pour ceux qui choisissent le régime de séparation de biens, il est beaucoup plus facile de régler le divorce en termes de biens et de dettes. Dans le cas de la communauté de biens, il faut prendre en compte les dettes et les biens communs et parfois même faire des évaluations pour savoir, par exemple, qui a apporté plus de contribution à ce bien ».
Me Punchoo explique que plusieurs problèmes peuvent se poser sous ce régime. « Par exemple, si un des conjoints avait un terrain avant son mariage et par la suite, il se marie sous la communauté de biens, puis les époux décident de prendre un prêt conjointement pour la construction d’une maison sur ce terrain. À savoir que selon la loi, le bâtiment construit appartient à la personne qui est propriétaire du terrain, peu importe si l’autre conjoint a investi de l’argent. Au moment du divorce, cela crée beaucoup d’amertume et de malaise. »
Si le régime matrimonial concerne la période débutant avec le mariage jusqu’au décès (s’il n’y a pas eu de divorce), le conjoint survivant est héritier de son conjoint décédé. « Par exemple, si l’époux décède, l’épouse a les mêmes droits dans la succession de son époux, peu importe le régime matrimonial. En l’absence de testament et de donation, elle obtiendra ce qu’on appelle ‘une part d’enfant’. »
Elle explique cependant la différence qui pourrait se poser. « Si une personne est mariée sous le régime de la communauté de biens, les biens achetés durant le mariage sont communs. Donc, si le couple a acheté une maison pendant le mariage, elle appartient aux deux personnes. Au décès de l’époux, seule la moitié du bien fera partie de la succession, car l’autre moitié appartient déjà à l’épouse depuis l’acquisition de la maison. Ainsi, l’autre moitié est partagée entre tous les héritiers, c.-à-d., les enfants et le conjoint survivant. Donc, si le couple a trois enfants, la moitié du bien est partagé entre quatre personnes. Par contre, si le bien n’appartenait qu’au mari, le bien en entier aurait été partagé à quatre ».
Les enfants ou les personnes en situation de handicap sont protégés par les dispositions de la loi, explique Me Punchoo. « Un adulte qui souffre d’un handicap sévère et qui ne peut pas participer dans un partage est protégé par les législations, à travers un tuteur désigné par la Cour avec l’autorisation d’un juge en chambre. Un parent peut aussi représenter un enfant mineur ».
Les enfants sont des héritiers réservataires et ne peuvent être exclus de la succession. « Aucun parent ne peut déshériter un enfant, même si les parents et les enfants sont en mauvais terme. Sauf dans deux cas exceptionnels pour cause d’indignité, par exemple, si l’enfant a essayé de tuer un de ses parents, ou si l’enfant a refusé de manière régulière de fournir de la nourriture à un de ses parents qui est dans une extrême pauvreté. Chaque enfant a une fraction de la réserve héréditaire, connue comme la quotité disponible. Elle est déterminée selon le nombre d’enfants. Cependant, un parent peut favoriser un des héritiers ».
Me Varuna Punchoo explique que les concubins n’ont aucun droit dans la succession. « Cela parce qu’ils n’ont pas un statut légal reconnu vu qu’il n’y a pas eu de mariage civil. Par contre, une personne peut décider d’offrir la quotité disponible à son concubin à travers un testament ou une donation. Au cas contraire, au décès de la personne, il n’obtient rien. » Elle explique que si des enfants sont nés hors mariage, ces derniers ont les mêmes droits. « Il faut cependant que le parent ait reconnu l’enfant légalement, sinon il n’aura aucun droit de succession. Même si c’est un enfant adultérin, c’est-à-dire si un homme marié a eu un enfant avec sa maîtresse et a reconnu l’enfant, ce dernier est aussi son héritier, car selon la loi, les enfants ne doivent pas payer pour les erreurs de leurs parents. Il en va de même pour les enfants qui sont nés d’une deuxième ou troisième lignée. En ce qui concerne l’adoption, en cas d’adoption plénière, l’enfant a les mêmes droits que les enfants naturels. En cas d’adoption simple, il peut avoir les mêmes droits, mais il reste aussi héritier de sa famille biologique».
La succession s’ouvre au décès de la personne. « À partir du moment du décès, tout ce qu’il possède comme biens et dettes deviennent les biens et les dettes de ses héritiers ».
En ce qui concerne les procédures, certaines personnes décident de procéder au partage tout de suite, alors que d’autres choisissent de rester en indivision pendant un certain nombre de temps. « Les héritiers ont le choix de choisir quand faire le partage ».
Le notaire explique que la première étape est « la notoriété après décès », plus connu comme « affidavit de succession », quand elle est effectuée par un avoué. « C’est ce document qui va établir les héritiers du défunt, est-ce qu’il existe un testament. Le délai pour effectuer ce document est de trois mois. Dépassé ce délai, il faudra payer une amende qui se situe entre Rs 500 et Rs 700 ».
« On devient héritier au décès de l’un des parents. Avant leur décès, nous ne sommes que des héritiers présomptifs. Nous n’avons aucun droit de succession », explique Me Varuna Punchoo. « Il y a différents ordres d’héritiers. Si le défunt a des enfants ou s’il est marié, tous les autres héritiers (comme les frères et les sœurs) sont exclus de la succession. Si le défunt n’est pas marié mais il a des enfants, ces derniers vont exclure tous les autres potentiels héritiers car les enfants font partie du premier ordre de succession. Si la personne n’a pas d’enfant, les frères et sœurs peuvent devenir des héritiers ».
En cas de disparition d’un des héritiers, il faudra attendre que la disparition soit prononcée pour que la personne soit déclarée judiciairement décédée. Par la suite, la succession pourra être effectuée.